Marathon de Boston © Marathon de Boston

Marathon de Boston, une course à l’héritage unique

MarathonWorld Majors
02/06/2025 20:55

À Boston, le marathon ne se court pas seulement : il se vit, se transmet et s’honore. Chaque troisième lundi d’avril, sur la ligne de Boylston Street, c’est bien plus qu’une course de 42,195 km qui s’achève. C’est une tradition centenaire qui s’écrit un peu plus, portée par l’histoire, la ferveur populaire et un attachement local unique. Lors de la dernière édition, plus de 30 000 coureurs ont foulé le bitume du Massachusetts, incarnant la diversité et la passion de ce rendez-vous mythique. Dans cette interview croisée, Jack Fleming, président-directeur général de la Boston Athletic Association et Mary Kate Shea, Senior Director en charge des athlètes professionnels, nous ouvrent les coulisses d’un monument du sport mondial à l’approche de sa 130e édition. De la singularité du parcours aux défis d’organisation, en passant par le rôle fondamental des bénévoles et la sélection des élites, ils reviennent avec passion et humilité sur les grands équilibres qui font de Boston une course à part dans le paysage mondial du marathon.

Quelques jours seulement après l’édition 2025, alors que les derniers drapeaux sont repliés et que Boylston Street a retrouvé son calme, nous avons eu le privilège d’entrer dans les coulisses de la Boston Athletic Association. C’est dans leurs bureaux historiques, en plein cœur de Boston, que Jack Fleming et Mary Kate Shea nous ont reçus. Une opportunité unique d’échanger, chez eux, dans un lieu empreint de mémoire, de photos et de trophées, là où chaque décision pour l’avenir du marathon se prend dans le respect de son passé. Un moment suspendu, à l’image de cette course hors du temps.


Dans les coulisses du plus vieux marathon du monde, entretien avec Jack Fleming, artisan de son rayonnement mondial et de son prestige international, et Mary Kate Shea, gardienne de l’âme de Boston.


| Le Marathon de Boston est une légende du sport, avec une première édition en 1897 et une longévité exceptionnelle. Quels sentiments vous inspire cette histoire longue de plus de 129 ans ? Comment perpétuez vous cet héritage tout en répondant aux enjeux du présent ?

Mary Kate Shea : L’année prochaine, nous fêterons le 130ème anniversaire du Marathon de Boston. Histoire, héritage et communauté sont les trois piliers qui nous font avancer et qui nous permettent de conserver cet élan de perpétrer ce marathon dans les années futures. C’est un évènement unique, avec un héritage et une histoire, ce qui permet de nous placer à part de tous les marathons du monde.

Jack Fleming : Nous avons la position du marathon le plus vieux du monde. Il y a une véritable responsabilité avec notre position, pas seulement dans notre rôle de leader de notre industrie et de notre sport, que ce soit par rapport à l’intégrité, l’éthique ou l’expérience que nous proposons mais aussi parce que nous coordonnons l’évènement sur ce qu’il a été, sur ce qu’il est et sur ce qu’il sera dans le futur. Nous nous considérons comme des gardiens de d’évènement. Chaque évènement, chaque course est différent. Boston est le reflet de la ville de Boston. Nous n’avons pas le désir de faire figure du marathon le plus grand ou de celui qui rassemble le plus de participants. Nous nous sommes toujours questionnés pour savoir si nous proposons seulement ou améliorons une expérience pour les participants, les huit villes et villages, les volontaires, les spectateurs, les sponsors, et les nombreux et divers acteurs. Notre but est d’être un évènement sportif de classe mondiale, qui invite et rassemble les coureurs du monde entier.

Depuis 2006, le Marathon de Boston est l’un des sept piliers des Abbott World Marathon Majors avec Tokyo, Londres, Sydney, Berlin , Chicago et New York. Ce circuit prestigieux, qui réunit les plus grandes courses sur route du monde, a renforcé la coopération entre les organisateurs, tout en stimulant leur capacité à innover pour proposer des expériences toujours plus fortes aux coureurs.

| Le Marathon de Boston est plus qu’une simple course. C’est une tradition profondément ancrée dans le cœur des habitants du Massachussets. Comment assurez-vous une expérience mémorable pour tous les participants, des élites aux coureurs de bienfaisance et aux différents coureurs ? Est-ce que vous avez lancé de nouvelles initiatives ces dernières années pour enrichir l’expérience ?

Jack Fleming : Les aspects liés à l’expérience qui viennent en premier sont d’abord l’introduction d’un festival de fans de trois jours au City Hall Plaza pendant le Weekend Marathon qui ne s’adresse pas uniquement aux participants, mais aussi à leurs familles. Ce festival est ouvert à quiconque est de passage dans la ville ou à ceux qui y vivent. Cette course peut être la première expérience de running ou de marathon en général pour quelqu’un ou pour la Boston Athletic Association. Et nous savons que la première impression compte énormément. Ensuite, nous nous sommes concentrés à veiller à ce que nos coureurs vivent la meilleure expérience de course possible, pas seulement les premiers mais aussi les derniers, et ceux au milieu de la course. Chacun mérite de ressentir le même sentiment d’accomplissement, peu importe leur allure. Nous étions particulièrement satisfaits cette année quand nous avons reçu beaucoup de retours positifs grâce à l’engagement des bénévoles et à l’attention que nous avons apportée à tout le monde.

Mary Kate Shea : Nous avons réussi à réunir plus de 10.000 volontaires pour un évènement de 30.000 personnes. Ces volontaires viennent depuis des décennies, et ils sont très investis. Ils sont accueillants et captivants. Quand vous arrivez à Boston, dès les premiers instants, vous voyez et ressentez l’excitation dans Boylston Street, qui est une ligne d’arrivée ouverte sur l’exposition pour récupérer votre dossard. Vous rencontrez des vendeurs, vous participez à des évènements divers autour du marathon. Quand vous êtes à Boston pour le Marathon Weekend, vous faites partie de notre famille du Marathon de Boston. Et les gens reviennent parce qu’ils développent ce sentiment d’appartenance quand ils viennent à Boston. C’est une toute petite ville, et le Marathon est devenu la ville, la ville est devenue le Marathon le temps d’un week-end. Ce n’est pas possible d’oublier qu’il y a le Marathon de Boston le jour de Patriot’s Day.

Chaque Major a sa personnalité propre. Berlin séduit les amateurs de records, Londres mise sur la diversité, Tokyo étonne par son organisation millimétrée. Et Boston ? Boston reste inclassable, à part. Attaché à ses traditions, à son parcours point-à-point et à son ambiance inimitable, il cultive une identité unique.

| Boston et ses communes traversées vivent au rythme du marathon chaque troisième lundi d’avril, le fameux Patriots’ Day. Quel est l’impact économique et les retombées sociales du marathon sur la région ? Et comment collaborez vous avec les villes, les habitants et les entreprises locales afin de maximiser ce résultat positif ?

Jack Fleming : L’impact économique du Marathon de Boston dans le Commonwealth du Massachusetts, donc au delà de Boston est de 509 millions de dollars, un demi-milliard de dollars en 2024. Nous nous attendons à un chiffre identique ou légèrement plus élevé pour 2025 mais nous ne pouvons pas l’assurer pour le moment. De plus, avec les huit villes et villages, Boston est bien positionné dans le calendrier, le 3ème lundi d’avril comme vous l’indiquez, après l’hiver qui est souvent très difficile ici. Les gens se réjouissent de l’arrivée du printemps. Tout le monde sait que le timing est parfait, avec Patriot Day comme vacances. Le Marathon de Boston reflète Patriot Day. Tout le monde attend cet évènement avec impatience. Le marathon est authentique, naturel, et pas sur-commercialisé et surfait. Chacune des huit villes et villages ont leurs propres âmes, qualités, personnalités, ce qui les rend toutes aussi intéressantes et différentes les unes des autres. Le Marathon de Boston est une sorte de voyage, et nous tablons là dessus. L’arrivée et le départ sont au même endroit, c’est une course qui fait une boucle, cela incarne vraiment l’esprit du marathon et l’un de nos plus grands atouts. C’est un voyage de 42 km qui incarne parfaitement l’idée du marathon.

Mary Kate Shea : Et, allant de pair avec cela, il y a le fait qu’un très petit pourcentage de la course, soit environ 2 000 personnes, collecte plus de 50 millions de dollars pour des œuvres caritatives locales, au bénéfice d’organisations caritatives locales. Ainsi, la moyenne par dossard caritatif collectée est supérieure à 14 000 $ cette année par personne. Et cela bénéficie à un grand nombre d’associations caritatives locales à but non lucratif. En 2025, la course a rassemblé plus 32 000 participants venus de 129 pays. Ce qui témoigne d’un rayonnement international exceptionnel.

Le Marathon de Boston dépasse largement la sphère sportive. C’est un moteur économique et social puissant pour la région du Massachusetts. Hôtels, restaurants, commerces, mais aussi associations et collectivités locales. L’événement mobilise et bénéficie à tout un écosystème.

Jack Fleming : L’impact économique du Marathon de Boston dans le Commonwealth du Massachusetts, donc au delà de Boston est de 509 millions de dollars, un demi-milliard de dollars en 2024. Nous nous attendons à un chiffre identique ou légèrement plus élevé pour 2025 mais nous ne pouvons pas l’assurer pour le moment.

Derrière les images de la foule sur Boylston Street et les émotions à l’arrivée, il y a des mois de préparation. La Boston Athletic Association s’appuie sur une organisation millimétrée, entre bénévoles fidèles et équipe permanente, pour orchestrer un événement d’envergure mondiale.

| Organiser le plus ancien marathon du monde, dans une ville avec un tel attachement émotionnel à la course, est un défi de chaque instant. Quels sont les enjeux les plus complexes dans votre organisation ? Combien de personnes composent votre équipe à l’année et pendant la semaine de course ?

Jack Fleming : Notre association Boston Athletic Association est composée d’un staff de 40 personnes non rémunérées. Nous avons le soutien de onze membres du bureau des gouverneurs, qui ont un conseil d’administration. Nous avons approximativement 325 chefs pour les volontaires, qui supervisent 9500 volontaires. Nous avons aussi un comité de course d’environ 110 consultants à temps partiel, et certains d’entre eux sont aussi bénévoles. Il y a des officiels, des juges… En ce qui concerne les enjeux, la popularité de notre sport post-Covid est incroyable. Donc, satisfaire la demande est l’un de nos challenges. Nous n’allons pas changer le Marathon de Boston, nous souhaitons conserver son côté traditionnel, resté inchangé depuis 129 ans. Mais beaucoup de gens veulent courir notre course, 79 % des gens obtiennent leurs temps de qualification, les autres 21 % sont invités, la plupart pour collecter de l’argent pour les associations. C’est un challenge pour nous de répondre à toutes les demandes, donc on réfléchit toujours à comment y répondre, s’il y a des améliorations possibles que nous pouvons apporter, de manière à ce que quelques autres personnes supplémentaires puissent intégrer la course. C’est probablement la question qui revient le plus souvent. Dans tous les cas, ce ne serait pas des centaines et des centaines d’autres. Les gens comprennent quand ils viennent, et quand ils voient que le parcours est relativement étroit.

À rebours des standards modernes, le parcours du Marathon de Boston ne répond pas aux critères d’homologation des records du monde. Il n’accueille pas non plus de meneurs d’allure. Deux choix assumés, révélateurs d’une certaine philosophie. Ici, on privilégie l’authenticité à la performance pure.

| Le marathon de Boston ne peut pas être homologué pour les records du monde en raison de l’écart entre le départ et l’arrivée, ainsi que pour son dénivelé négatif d’environ 140 mètres. Est-ce un problème pour vous ? Pourriez-vous revoir le parcours en profondeur pour rentrer dans le cahier des charges d’un record du monde ? | Spécificité propre au Marathon de Boston, il n’y a pas de meneurs d’allure à Boston. Pour quelles raisons ? Dans un avenir proche, pourriez-vous faire appel à des meneurs d’allure pour les athlètes Elites ?

Mary Kate Shea : Nous avons eu des records du monde à Boston en valide et en fauteuil, mais quand World Athletics s’est formé (anciennement IAAF), qui venait du monde de l’athlétisme sur piste, ils ont mis en place des paramètres pour les courses sur route également. Et Boston n’entrait pas dans les catégories, mais ils prennent en considération les faux plats, les côtes et le vent. Les athlètes reconnaissent l’importance d’avoir couru Boston dans leur carrière, et cela ne les empêchent pas de reconnaître leurs exploits accomplis à Boston. Quand les règles ont été instaurées, les coureurs cherchaient des courses très rapides et plates éligibles au record du monde, mais des courses atypiques, qui relèvent du challenge comme Boston ne l’étaient pas. La course a été conçue sur le modèle des Jeux olympiques, comme une course de championnat, il n’y a pas de lièvres, vous courez pour vous même, vous avez une stratégie à établir, une place à aller chercher. C’est l’essence du sport. Beaucoup de coureurs de pays différents viennent, nous sommes très fiers de cela, les athlètes apprécient l’expérience.

Jack Fleming : Nous sommes respectueux de la terminologie record du monde, mais nous aimons utiliser le mot le meilleur du monde « world’ best ». Même récemment, avec Marcel Hug dans la catégorie fauteuil qui n’a pas seulement réalisé un record de la course l’an dernier, mais aussi la meilleure performance du monde. La topographie du Marathon de Boston n’offre pas d’avantages, parce qu’il y a des côtes difficiles dans les zones 16 à 21,5 km, c’est donc une course très difficile. Nous avons de grands compétiteurs qui participent au Marathon de Boston. Personne ne vous dira que c’est une course qui procure un avantage quelconque. Toutes nos courses, comme le semi-marathon de Boston sont réputées pour être difficiles, vous venez pour un défi, vous courez surtout pour la compétition, le classement, ce qui constitue véritablement l’essence du sport. Vous êtes là pour vous aligner à une compétition, c’est ce que Mary-Kate a dit aux coureurs lors de la réunion technique ou du recrutement. C’est comme, hey, vous pouvez courir un temps rapide, mais ici c’est la compétition, à propos de la première place, de la seconde place, de la troisième place, du top 10, peu importe, nous adorons admirer l’adversité. Il n’y a pas non plus d’assistance pendant l’épreuve. Les coureurs doivent se débrouiller seuls, nous suivons scrupuleusement les règles.

« À ma connaissance, c’est la seule course au monde avec une ligne peinte comme celle-ci. Grâce à un accord avec la Mairie de Boston, on peut la repeindre plusieurs fois par an pour qu’elle reste bien nette et visible. »

Mary Kate Shea

| En Europe, beaucoup de coureurs aspirent à participer, mais à notre connaissance, il faut être très performant pour participer à la loterie. Est-ce que vous comptez alléger les critères à l’avenir ?

Jack Fleming : C’est une question très difficile. C’était une grande nouvelle en Europe quand nous avons constaté cette demande. Beaucoup de personnes concourent pour participer à l’évènement, avec des temps assez intéressants. Nous nous efforçons d’être accessibles au plus grand nombre de personnes, tout en travaillant sur les catégories. Nous reconnaissons que beaucoup de personnes souhaitent courir le Marathon de Boston et que celles-ci consacrent des années à essayer d’obtenir des temps de qualification. Et nous souhaitons célébrer cette réussite. Systématiquement, nous examinons, prenons en considération les temps, tout en étant accessibles aux para-athlètes. Nous essayons de rendre la course accessible à de plus en plus de personnes et nous travaillons sur toutes ces catégories. Nous reconnaissons que beaucoup de gens veulent courir le Marathon de Boston et qu’ils sont nombreux à vouloir s’aligner sur cette course mythique. Nous examinons les temps, essayons aussi de rendre les temps qualificatifs pour entrer à l’épreuve accessible à plus de personnes, et nous travaillons sur toutes les catégories différentes. Nous savons que les coureurs mettent parfois plusieurs années à atteindre les standards, donc nous voulons récompenser leurs accomplissements, nous examinons cela et le considérons. Répondre à la demande est un véritable défi pour nous.

| Boston est aussi reconnu pour son engagement pour la diversité, l’accessibilité. Quelles sont vos actions pour représenter au mieux les communautés, femmes, minorités, handicapés ?

Mary Kate Shea : Nous faisons en sorte que Boston soit accessible aux para-athlètes. Nous avons sept catégories de para-athlètes à Boston, en plus de la catégorie fauteuil, qui célèbre d’ailleurs son 50ème anniversaire. Nous sommes le premier marathon à proposer des courses de fauteuil, et nous célébrons cela depuis de nombreuses années. Nous voulons vraiment être les meilleurs dans la dimension de l’accessibilité, nous aspirons à être les leaders de l’industrie. Nous travaillons en collaboration avec beaucoup de marathons major autour du monde et nous nous partageons nos initiatives. Nous voulons les encourager à nous suivre. Nous sommes le seul marathon au monde à offrir des primes pour toutes les para-divisions et nous encourageons les autres organisations à le faire. Nous cherchons des moyens d’aider les para-athlètes et ceux en situation de sport adapté. Le marathon est quelque chose d’incroyable, être capable d’en courir un est un exploit extraordinaire. Nous voulons juste ouvrir les portes un peu plus largement et ainsi reconnaître les accomplissements de tous les athlètes.

Aujourd’hui, toujours sur le marathon, il y a plus de participants hommes que de femmes. Mais ce n’est pas un problème pour nous au Marathon de Boston parce que nous avons des qualifications équitables entre les groupes d’âges et les genres. Nous avons aussi une catégorie non binaire et une pour les para-sportifs professionnels. Nous tentons de soutenir le plus possible toutes les communautés. Nous avons vraiment l’impression de ne faire que commencer notre plan de développement sur trois ans.

Jack Fleming : Nous comprenons la tension que nous subissons. Mais nous sommes, en même temps, un important évènement local, national et international. La dimension locale nous importe beaucoup, nous rendre le plus ouvert possible aux locaux est une grande préoccupation. Nous développons notre programme d’initiatives locales pour travailler sur le voyage que procure le marathon pour les habitants, pour qu’ils soient capables de courir un jour le Marathon de Boston. Je suis certain que ce programme local nous fournira de précieux renseignements sur ce qui pourrait être applicable un jour, pour d’autres programmes nationaux ou internationaux.

Nous avons un vaste plan de développement sur trois ans que nous adaptons sans cesse. Notre association est à but non lucratif, et nous avons un conseil d’administration, nous le rappelons. Dans notre bureau de gouverneurs, la présidente Cheri Blauwet est deux fois championne du Marathon de Boston dans la catégorie féminine fauteuil. Elle est aussi deux fois championne du Marathon de New York, et quatre fois du Marathon de Los Angeles. Chéri Blauwet (championne paralympique) a énormément d’idées pour promouvoir les para-athlètes. Nous proposons une méthode adaptative de participation à la course, pour les para-divisions. Depuis trois ans, c’est notre grand centre d’intérêt en terme de croissance organisationnelle. Que ce soit adapter, faire de la place sur la chaussée lors de la course, nous réfléchissons à ce que nous pouvons faire, construire des infrastructures, soigner la communication, les regroupements, sensibiliser les volontaires… Et puis, nous avons également une division para-professionnelle. Nous offrons aussi des primes d’engagement. Nous assurons le voyage, l’hébergement, les repas. Le soutien que nous offrons en coulisses est assez complet. Nous nous efforçons donc d’offrir une base de soutien, plutôt que seulement le podium, ce que le monde extérieur perçoit.

| Enfin, la question environnementale est aujourd’hui incontournable pour les événements de cette ampleur.
Quelle est votre politique en matière de développement durable ? Quelles actions concrètes menez-vous pour réduire l’empreinte écologique du marathon ?

Jack Fleming : Nous travaillons avec World Athletics dans leurs initiatives de développement durable pour respecter tous ces aspects. Nous avons aussi un partenariat dans ce sens avec Schneider. La première étape a été de trouver un vrai partenaire qui était capable de travailler avec nous là où nous en sommes, pour améliorer chaque aspect lié à la durabilité : l’empreinte carbone, l’accessibilité, la gouvernance, et tout ce qui est lié au développement durable. Nous savons que c’est aussi un souhait des participants et de la ville de Boston, mais de notre organisation également.

Mary Kate Shea : Cela prendra des années mais nous sommes sur le bon chemin. Si vous allez sur le site World Athletic, vous verrez probablement que nous avons une cinquantaine de critères à développer.

| Deux questions plus personnelles, depuis que vous êtes à la tête du Marathon de Boston, quel est votre souvenir le plus marquant ? Un moment symbolique qui vous a particulièrement ému ? Et avez-vous une anecdote méconnue ou inspirante sur les coulisses de l’événement que vous aimeriez partager ?

Jack Fleming : Je suis à la tête du Marathon de Boston depuis 35 ans. Vous savez, le sport livre des moments iconiques. Je n’ai pas un souvenir personnel précis, mais plutôt liés à tous les gens que j’ai rencontrés au travers du marathon. J’ai été marqué en 2014 par la victoire de Med Keflezighi ou en 2018 de Desiree Linden, deux américains qui voulaient vraiment gagner Boston, qui sont revenus plusieurs fois après avoir échoué à leur objectif dans le passé pour courir vers la victoire. C’était très gratifiant pour nous tous, qui les suivaient depuis plusieurs années. Mary Kate a fait venir de grands champions, comme Eliud Kipchoge. Quand il a pu venir il y a quelques années, il n’a pas gagné et il a dit au monde à quel point Boston est extrêmement difficile. Et cela a encore plus mis en lumière ceux qui brillent à ce marathon. Merci à Kipchoge d’avoir insisté là dessus, qu’il s’agit d’une course différente des autres, d’une course dure. C’est une partie de l’héritage du Marathon de Boston. Ce coureur de légende a fait 6ème, ce qui n’est pas mauvais, mais ce n’est pas ce qu’il voulait. Nous le remercions encore d’avoir choisi notre course il y a trois ans.

Mary Kate Shea : J’adore chaque course, chaque édition est différente. Je me souviens de Moses Mosop qui a perdu de quelques secondes face à Geoffrey Mutai. Sans oublier la victoire du Japonais Yuki Kawauchi qui n’a jamais accédé à l’équipe olympique mais qui a participé à trois Championnats du Monde pour le Japon. L’athlète qui avait gagné en 2018 sous une pluie battante avait puisé au plus profond de ses sentiments pour l’emporter. J’ai aussi été scotchée par Desiree Linden, mais aussi par tous les incroyables champions qui sont venus, Helen Obiri, Evans Chebet, Catherine Ndereba. Il y a tellement de moments iconiques qui ont eu lieu à Boston Street. Je ne peux pas en citer un seul. C’est ce qui rend Boston si particulier. Peu importe votre record personnel quand vous venez à Boston, ce qui importe, c’est la manière dont vous allez vous adaptez à tous les changements qui se passent pendant la course, comment vous allez vous accrochez, serrer les dents. Le gagnant va être celui qui va avoir le petit plus qui fera la différence.

Boston Athletic Association
La ligne d’arrivée est peinte au sol et entretenue toute l’année,
comme un hommage permanent aux milliers de coureurs qui s’y succèdent chaque édition.
© Marathons

| Avez-vous en tête ce que pourraient être les prochaines éditions ?

Jack Fleming : Tout d’abord l’année prochaine, pour les 130 ans de la course, il y aura une importante fête américaine pour les 250 ans des Etats-Unis. Les festivités commenceront avec Patriots Day 2025 qui seront étendus sur 16 mois jusqu’à l’édition 2026 du Marathon de Boston et de Patriots Day. Il y a un engouement qui commencera le 4 juillet 2026, Independence Day. L’année prochaine il y aura la Coupe du Monde dans le pays, il y aura aussi des fêtes dans d’autres villes des Etats-Unis, nous faisons partie de tout cela. En 2030, la ville de Boston fêtera ses 400 ans, après avoir été fondée en 1630. Nous sommes en conversation avec les maires des villes pour savoir à quoi cela ressemblera.

| Hormis les courses que vous organisez, quelle est celle qui vous tient particulièrement à cœur ?

Jack Fleming : J’adore la distance 10 km. En dehors des courses que nous organisons, je pense d’abord au 13.1 miles semi-marathon Bank of America à Chicago qui est très différent d’un semi-marathon sur la côte ouest. Je suis très impressionné par la manière dont les communautés de coureurs affluent vers la West Coast, qui traversent trois parcs de la ville dont l’intérêt est de valoriser des quartiers qui ne vous viennent pas habituellement à l’esprit quand vous pensez à une course sur route. Ils font un travail magnifique.

Mary Kate Shea : J’allais parler du Nipmuck Trail Marathon. Je dirais que l’une de mes courses favorites en tant que coureuse est le Vermont 50 miles or 100 miles. Cependant, le Marathon de Boston reste particulier à mes yeux. Il y a un esprit de communauté quand vous êtes ici, à Boston, autour d’un nombre incroyable de coureurs, peu importe combien de temps le marathon vous prendra. Boston est mon marathon préféré. Quand vous courez à Boston, pour beaucoup de gens, ce qui compte avant tout c’est de passer la ligne d’arrivée. Vous voulez donner tout ce que vous avez ce jour précis à Boston. Et c’est ce que j’aime en contraste avec ces ultras où il y a plus un sens de la communauté, dans le sens où nous sommes tous ensemble et que tout le monde va terminer, peu importe combien de temps cela prendra, nous finirons la course.


Depuis 35 ans, Mary Kate Shea et Jack Fleming veillent sur le Marathon de Boston comme on veille sur un trésor : avec passion, exigence et humilité. Derrière chaque dossard, chaque sourire de bénévole, chaque foulée lancée sur les collines de Newton, ce sont leurs visions qui façonnent cette alchimie si particulière. À Boston, on ne court pas seulement pour un chrono : on court pour appartenir à quelque chose de plus grand que soi. Et à l’aube de sa 130e édition, cette légende vivante du running continue de se réinventer sans jamais trahir son âme.

L’édition 2026 du Marathon de Boston aura le 20 avril prochain, découvrez toutes les infos !

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