La plateforme en ligne de vente de seconde main Vinted ne cesse de croître. L’équipement running y détient une place de choix. © 10 km de la Tour Eiffel

Chaussures Nike, pièces rares, contrefaçons… Vinted entre dans la course à l’équipement running

MarathonRunners InspirantsInsideCommunautéPratiques
05/11/2025 21:05

Depuis sa création en 2008, la plateforme en ligne de vente de seconde main Vinted ne cesse de croître. L’entreprise s’impose aujourd’hui comme celle qui vend le plus de vêtements en volume, selon l’Institut français de la mode. Et parmi les milliers de transactions quotidiennes, l’équipement running détient une place de choix.


Avec plus de 23 millions d’utilisateurs en France, l’application de seconde main Vinted s’impose comme le premier vendeur de vêtements. Soit près d’un tiers des membres de la franchise présente dans une vingtaine de pays. Les vêtements et les chaussures, notamment ceux dédiés à la course à pied, ont su se faire un créneau privilégié au sein de l’application. Alors que le running et les marques associées explosent, la plateforme devient très prisée des sportifs. Vêtements et chaussures neufs ou d’occasion, articles introuvables dans le commerce classique, accessoires vintage, certains voient en Vinted le nouveau terrain de jeu pour s’équiper.

| Les trésors cachés de Vinted

Certains sportifs utilisent Vinted pour dénicher du matériel exclusif, souvent issu d’athlètes sponsorisés. Ces pièces sont introuvables ailleurs et font le bonheur des coureurs connectés. Pauline Weber Ferrari, athlète de niveau national sur route, cross et piste, dit adorer l’application pour trouver ces « produits d’exception qui concernent la quasi-totalité de ses achats » sur l’application.

La vice-championne de France espoirs 2022 du 10 km a trouvé une alternative aux prix élevés du site de niche Track and Field Clothes, spécialiste de la revente d’équipements d’athlètes sponsorisés. Elle n’utilise pas Vinted pour économiser ou pour vendre, mais plutôt pour des recherches bien précises.

« Grâce à Vinted, la revente s’est démocratisée. Les sportifs se sont mis à vendre leurs affaires, surtout quand ils changent de sponsors. Ils ne cherchent pas forcément le profit, mais à vider leurs placards. C’est là que ça devient intéressant, cela permet d’obtenir des pièces uniques, qu’on ne voit pas sur toutes les pistes. En plus, il est possible de négocier, ce qui n’est pas le cas sur un site classique. »

Pauline Weber Ferrari, vice-championne de France du 10 km 2022

Au-delà des articles exclusifs, l’athlète achète aussi des vêtements plus classiques, mais qu’elle connaît déjà. Shorts Nike Aeroswift ou adidas Adizero, la coureuse ne prend pas de risques en changeant de référence mais aime chercher la bonne affaire. La spécialiste de la route se méfie des nombreuses paires de running mises en vente sur Vinted, pas toujours authentiques. « Un ami coureur avait commandé un modèle à plaque carbone, neuves, avec la boîte. Au bout de quelques sorties, il a eu mal aux pieds. La semelle s’était déchirée. En la découpant, il s’est rendu compte qu’il n’y avait pas de plaque carbone dedans, c’était des imitations. »

Une mésaventure qui lui en a rappelé une autre, après avoir acheté un faux t-shirt de gamme élite, vendu comme un authentique. « C’est moins grave pour les habits, mais pour les chaussures, je suis très frileuse, j’ai arrêté ma consommation de chaussures sur Vinted, parce que c’est presque impossible de savoir si ce sont des vraies ou des copies. »

Huitième du marathon des Jeux de Paris, Conner Mantz incarne cette génération de coureurs américains qui redonnent vie au marathon. Ce dimanche, il tentera de battre le record national au prestigieux Marathon de Chicago. Un coureur méthodique, travailleur, accro à l’entraînement. Grâce à ses qualités et son expérience, il s’est retrouvé au cœur d’un projet secret signé Nike : tester un prototype encore inconnu du grand public, la Vomero Premium.
Les chaussures, l’un des produits les plus contrefaits sur Vinted © Nike

| Vinted, royaume des contrefaçons

Un constat partagé par Romain Levêque, coureur de niveau régional et utilisateur de Vinted depuis huit ans. Il se procure surtout des équipements de running neufs. « Je suis beaucoup plus réticent qu’avant pour acheter des chaussures, j’ai l’impression qu’il y a de plus en plus de faux sur la plateforme maintenant, lié à l’expansion des sites comme Aliexpress. Je ne prends plus le risque », détaille l’Auvergnat qui a débuté sur Vinted en faisant de l’achat-revente pour gagner un peu d’argent.

Même s’il a arrêté l’activité parallèle, le coureur revend les modèles qu’il n’a pas aimés, histoire d’éviter qu’ils ne dorment dans un placard. « Je mets des prix peu élevés, 50€ une paire que j’ai achetée 110€ et que j’ai portées deux ou trois fois. Je fais pareil quand mes paires sont trop usées, je les lave, je ne mets pas tous les détails dans les commentaires. Je les revends à des prix bas pour m’en débarrasser. »

Le coureur remarque des effets de la popularité grandissante de l’application. Son hypothèse, plus de personnes connectées en continu, donc plus de concurrence et moins de possibilités de faire « des gros coups. » « Le secret de Vinted, c’est simple. Plus tu y vas, plus tu peux dénicher de bonnes offres », résume l’intéressé qui a remarqué qu’il y a quelques années, les membres s’intéressaient moins à ce qu’ils vendaient. « Maintenant, c’est plus dur de trouver la perle rare, c’est sûrement lié à la concurrence des vendeurs, à ceux qui consultent fréquemment ou aux personnes qui se renseignent davantage avant de choisir un prix de vente. »

| Méfiance et prudence

Le premier argument pour les sportifs, ce sont des prix souvent plus bas que dans le commerce. Avec l’expansion de la course à pied, les marques spécialisées fleurissent, et pas toujours à des prix attractifs. Vinted permet souvent de s’équiper à moindre coût, mais pas toujours.

Agathe Coutre, athlète de niveau interrégional dans l’Allier explique avoir acheté sur Vinted à « deux ou trois reprises seulement ». Elle préfère se tourner vers les multiples promotions des sites classiques, surtout pour les chaussures de peur des contrefaçons. « Je n’ai pas toujours confiance en ceux qui vendent énormément d’articles d’une même marque de sport, je trouve ça louche. »

Son homologue Amélie Poyet partage le même avis. La coureuse ne navigue pas par hasard sur l’application et réserve Vinted à des recherches précises pour des articles neufs uniquement. La graphiste achète dessus seulement après s’être assurée que le produit en question est moins cher sur la plateforme en ligne et quand ce qu’elle cherche n’est plus disponible ailleurs.

« La plupart du temps je trouve que ça ne vaut pas vraiment le coup, on peut souvent se procurer de l’équipement moins cher en solde et neuf, sur d’autres sites. Pour les chaussures, vu le nombre d’imitations, c’est vraiment risqué et peu intéressant. »

Amélie Poyet, athlète de niveau interrégional

Amélie Poyet reconnaît avoir du mal à dénicher la perle rare et juge que le textile technique reste assez cher, entre frais de protection acheteur et livraison. Effectivement, quand vous réalisez une commande, vous devez ajouter plusieurs frais, ce qui peut faire grimper la note, parfois près de 10€. Autant de commissions qui s’ajoutent et qui dépassent parfois le prix de vente. De quoi refroidir plus d’un utilisateur.

| Une application pensée comme un réseau social

La mode, et notamment les vêtements de sport, reste la catégorie la plus populaire sur Vinted. Au fil du temps, l’application a élargi son offre à de nouveaux univers, comme l’électronique. Le géant de la seconde main ne se contente plus d’ouvrir la porte au textile et aux baskets, mais aussi aux montres GPS, casques à conduction osseuse et autres accessoires liés au running.

L’entreprise développe plusieurs outils, comme la recherche par image façon Google Lens. L’idée : dénicher un produit plus vite grâce à une simple photo. Son succès repose aussi sur la possibilité de faire des offres et de discuter avec les vendeurs, et renforce le plaisir de négocier et de faire une bonne affaire. Autant d’innovations qui rendent la plateforme toujours plus fluide… et un peu addictive.

Certains habitués deviennent très aguerris. Aujourd’hui, l’application fonctionne presque comme un réseau social. Plus vous êtes actifs dessus, plus vous consommez, plus l’algorithme connaît vos besoins précis. Vous avez davantage d’annonces qui vous correspondent, ce qui vous rend encore plus susceptible de craquer.

Se connecter devient vite un réflexe, presque aussi naturel que de scroller Instagram. Au fur et à mesure, vous apprenez à cibler vos recherches, à utiliser toute la panoplie de filtres et de fonctionnalités. De quoi vous pousser à une veille quotidienne et à développer un certain sentiment de satisfaction quand vous tombez sur le dernier short de running introuvable ailleurs.

| Des articles de plus en plus recherchés

Et forcément, cette dynamique crée une nouvelle économie autour des articles les plus prisés. L’engouement d’un article peut se faire connaître grâce au système d’ajout de favoris et aux récentes mentions « en demande » ou bien « cet article est très populaire ». Des indicateurs qui peuvent pousser à l’achat compulsif. Avec l’augmentation du nombre d’utilisateurs et l’interface de plus en plus travaillée, certains articles de sport s’arrachent en quelques minutes, malgré les prix parfois plus élevés que dans le commerce.

Un exemple marquant. Le t-shirt en édition limitée de l’influenceur Clem qui court. Vendu à moins de 40€, l’article s’est retrouvé revendu à plusieurs centaines d’euros sur Vinted. Ce cas de figure est de plus en plus commun sur l’application. Certains utilisateurs se disent poussés à acquérir un produit, puisqu’il peut ne jamais réapparaître. D’autres développent un sentiment de frustration quand un acheteur a été plus rapide. Beaucoup expliquent se connecter souvent, de peur de manquer une bonne affaire.

La popularité des articles de sport sur l’application n’est plus à prouver. Maryline Ferraz, vendeuse et acheteuse assidue et athlète de niveau interrégional l’a bien remarqué. « J’adore ce site qui permet de revendre très facilement et rapidement. Les vêtements techniques partent extrêmement vite à des prix intéressants, surtout les modèles Nike, très recherchés ». La spécialiste du 800 m met en ligne ses paires de chaussures pour gagner de l’argent et ainsi en acheter d’autres, tout en prenant garde aux contrefaçons. La kinésithérapeute revend aussi des articles d’athlètes d’élite, achetés à des vendeurs spécialistes sur la plateforme ou reçus de la part de ses amies en contrat avec des marques.

« J’adorais me procurer ces pièces exclusives, que j’ai peu portées parce que je ne me sens pas légitime de m’habiller comme une athlète d’élite. J’ai accumulé tellement de tenues pour courir. Aujourd’hui, je suis pragmatique, je garde l’essentiel et je revends le reste. Autant que cela fasse plaisir à d’autres. »

Maryline Ferraz, athlète et utilisatrice assidue de Vinted

Vinted concurrence sérieusement les sites classiques d’équipements running. Entre bonnes affaires, produits rares et contrefaçons, l’application regorge de merveilles mais aussi de mauvaises surprises. Certains coureurs ne peuvent plus s’en passer, alors que d’autres préfèrent ne pas tenter d’acheter sur la plateforme. Quoi qu’il en soit, l’application a du potentiel pour s’imposer comme un lieu à part dans la recherche de produits sportifs.


Emma BERT
Journaliste

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