Courir un marathon est une aventure palpitante qui suscite parfois une certaine appréhension. La préparation mentale s'avère être une alliée. © ASO

Marathon : la préparation mentale pour faire la différence

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14/11/2025 14:37

Courir un marathon, c’est s’élancer dans une aventure palpitante. Entre entraînement intensif, récupération millimétrée et nutrition rigoureuse, cette course marque durablement chaque coureur. Parfois, l’inquiétude et le doute s’invitent dans cette quête. Le travail sur le mental devient alors un allié précieux pour aborder au mieux cette distance mythique. Entretien avec Éloïse Terrec, préparatrice mentale et ancienne athlète de haut niveau en marche athlétique.


Débutants ou confirmés, le marathon incarne la distance légendaire par excellence, à la fois intrigante et fascinante. Être un coureur de fond, c’est faire face à la douleur, à soi-même et surtout aux interrogations. C’est pourquoi l’entraînement de l’esprit est tout aussi essentiel que celui du physique. Et pour cause, ce travail intérieur est bénéfique pour tous.

« La préparation mentale complète tous les autres aspects de la performance, souligne Éloïse Terrec, préparatrice mentale et ancienne sportive de haut niveau en marche athlétique (6 sélections en international A, 10 chez les jeunes). Elle s’intègre dans un système global où l’on se projette sur son objectif, le jour J, l’entraînement, mais aussi sur les craintes et les appréhensions ». Le but, bénéficier d’un accompagnement, semblable à celui d’un coach, apprendre à se poser les bonnes questions et découvrir des méthodes pour renforcer son mental.

© STADION-ACTU

| Passer de l’autre côté de la barrière

Ce cheminement, la sportive l’a emprunté elle-même. Avant de guider les autres, la passionnée a expérimenté la rigueur et la difficulté du haut niveau. Après un burn-out sportif, la marcheuse s’est intéressée de très près à l’équilibre entre performance et bien-être. Forte de son passé d’athlète, la spécialiste mesure mieux que quiconque la rudesse des épreuves de fond. Le 20 km marche, l’une de ses disciplines de prédilection, exige le même engagement que la distance mythique. Ancienne détentrice de plusieurs records de France, la Bretonne comprend parfaitement le quotidien et les interrogations des sportifs. Un atout précieux pour guider au mieux ses clients.

Si l’entraînement de l’esprit se fait aujourd’hui une place, celui-ci a souvent été relégué au second plan. Longtemps négligée, voire taboue, la gestion de la tête s’avère pourtant bénéfique, et même au-delà du sport. Les différentes méthodes associées peuvent être appliquées dans la vie de tous les jours. « Il s’agit d’analyser ses schémas mentaux et son fonctionnement personnel. C’est avant tout apprendre à mieux se connaître », souligne la multiple championne de France Elite du 10 000 m et du 3000 m marche.

| Appréhender au mieux la compétition

Sur la ligne de départ, le travail mental prend tout son sens. Courir les 42,195 km peut sembler immense, presque intimidant. De plus en plus de coureurs se lancent dans l’aventure, quel que soit leur niveau, créant une véritable émulation mais aussi une certaine pression. « Il est essentiel d’accepter cette crainte et de s’y préparer. Mon rôle est de proposer des outils concrets pour faire prendre conscience à la personne qu’elle a la capacité de réussir. En préparation mentale, on agit sur les freins psychologiques, la confiance, les certitudes mais aussi sur le discours interne », explique celle qui s’est tournée vers ce métier il y a un peu plus de deux ans.

Élaborer un dialogue intérieur, mettre en place des exercices de relaxation, de respiration et de gestion du stress sont autant de leviers pour aider le sportif. Éloïse Terrec conseille de trouver des repères où focaliser son attention pour rester concentré dans sa course et moins sur ce qui se passe autour.

| Se retrouver au pied du mur… du 30ème kilomètre

Les blocages principaux sont surtout la peur de la douleur, le manque de confiance en soi et l’appréhension du mur du 30e kilomètre. Se faire une montagne de cette barrière invisible installe une attente, et donc une crainte d’aborder ce passage de la course. « Dans cette épreuve, il y a tellement de ‘on dit’ que parfois, on prend les croyances et peurs des autres. Sauf qu’on ne sait même pas si on va subir le mur du 30e, ce coup de mou peut arriver avant ou après, c’est intéressant de démystifier tout cela et de faire comprendre au coureur qu’il a toutes les qualités pour surpasser cet obstacle », détaille la passionnée.

Son astuce : effectuer un « switch », une sorte de bascule mentale, pour passer du 29e au 31e kilomètre, comme si le 30e n’existait pas. L’ancrage, ce sont des gestes, des mots, des images, un souvenir ou même une couleur qu’un sportif utilise pour maintenir un état d’esprit compétitif. La professionnelle conseille de passer d’un état mental de la première partie de course à un deuxième prévu pour les ultimes hectomètres. Le découpage de la distance aide bien souvent à surmonter la difficulté. « Cela consiste à utiliser ce mur pour faire un basculement. Il est même possible d’utiliser les croyances du marathon à son avantage. »

| L’ancrage, s’accrocher à un mot, une image, un souvenir

Marathon Des Alpes‑Maritimes Nice‑Cannes 2025 (6)
© Activ’images

Une autre forme d’ancrage, le mot, ou mantra, inscrit sur la main ou le bras ou simplement dans la tête. Il doit avoir une portée personnelle, et l’on doit s’exercer à se le répéter. « Ce n’est pas judicieux de reprendre un mot utilisé par quelqu’un d’autre et de se dire qu’on se dira cela pendant la course et que cela nous aidera. Il doit fonctionner comme un véritable ancrage, capable de nous replonger dans le bon état d’esprit et de nous remotiver. »

La douleur fait partie intégrante de la performance, et elle est inévitable. En prendre conscience et être persuadé qu’on peut se sublimer change la manière d’appréhender l’épreuve. « C’est une question d’interprétation », résume l’intéressée. Mais avant d’affronter la souffrance le jour J, encore faut-il rester concentré jusqu’à l’échéance.

La spécialiste rencontre aussi souvent des personnes qui ont du mal à rester motivées tout au long de cette préparation très exigeante. La lassitude finit parfois par s’installer au fil des longues semaines d’entraînement. La régularité est la clé pour ne pas se décourager, car les difficultés jalonnent le chemin des fondeurs.

La Bretonne préconise la routine comme moyen d’accéder à un objectif. Conserver ses habitudes est primordial pour ne pas se retrouver sans repères le jour J. Identifier ce qui fonctionne à l’entraînement et ce qui favorise un état d’esprit aide à construire sa propre routine. S’inspirer des autres peut être utile, même si chacun doit composer selon ses propres besoins.

« Il ne faut pas s’inquiéter si vos habitudes ne ressemblent à aucune autre. Si parler ou rire est votre manière de vous concentrer alors que les autres s’isolent avec leurs écouteurs, il n’y a pas d’inquiétude à avoir. »

Éloïse Terrec, préparatrice mentale et ex-athlète de haut niveau

| Quand commencer à muscler son esprit ?

« Dès le début de votre préparation marathon, suggère l’internationale en marche athlétique. Certains athlètes viennent me consulter à quinze jours de leur course. Ce n’est pas incompatible, mais les effets sont plus limités qu’avec une préparation amorcée plus tôt. On ne pourra pas se pencher en profondeur sur les freins de la personne. »

À l’entame des dernières semaines, la visualisation devient un outil précieux pour se projeter dans l’événement. Dans cette épreuve titanesque, la tête compte presque autant que les jambes. Pour la spécialiste, l’équilibre est clair : 50% mental, 50% physique, parfois même 60% pour le mental dans les moments les plus durs. Le mental prend le relais « quand on rentre dans le dur », c’est lui qui domine pour résister lorsque physiquement, « il n’y a plus rien ».

| Pression du chrono, pression sociale

La déception comme l’échec font partie de la vie du sportif. Les semaines d’entraînement en amont sont difficiles, et les attentes pour cette épreuve mythique sont souvent élevées. Apprendre à gérer sa frustration en cas de raté est aussi une dimension importante. « Il y a une sorte de monde qui s’effondre si le marathon n’est pas réussi et cela crée de la pression », met en lumière l’ancienne internationale.

« L’erreur la plus fréquente est de se focaliser uniquement sur la performance, sur le chrono et le résultat final. Autant chez les débutants que les élites. Prendre du recul, se rappeler que tous les efforts fournis avant la course comptent, offre une autre perception de l’échec. Équilibrer la performance et la manière dont on a envie de vivre l’expérience aide à relativiser. »

Éloïse Terrec, préparatrice mentale et ex-athlète de haut niveau

Courir un marathon n’est pas seulement un exploit physique. C’est aussi une bataille contre soi-même et la douleur, celle qui rend l’accomplissement encore plus grand. Les mythes et les craintes qui auréolent cette épreuve la rendent aussi mythique qu’intimidante. Quand les jambes faiblissent et que le souffle se fait court, il ne reste qu’une force sur laquelle compter : le mental. Apprendre à dompter son esprit fait partie intégrante de l’entraînement, comme une brique de plus pour guider le coureur jusqu’à la ligne d’arrivée.

 Découvrez le calendrier des marathons


Emma BERT
Journaliste

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