© Maratón Valencia Trinidad Alfonso Zurich
Marathon de Valence 2025 : John Korir et Joyciline Jepkosgei en état de grâce sur le tapis bleu
Valence a encore frappé très fort. On savait que le peloton 2025 était monstrueux, on savait que le parcours était une usine à records… mais personne n’avait anticipé un tel déferlement de performances. Entre la démonstration de John Korir qui signe un chrono canon en 2h02’24 et la course parfaite de Joyciline Jepkosgei qui devient la 4e meilleure performeuse de l’histoire avec un temps de 2h14’00, Valence a prouvé une nouvelle fois qu’elle était la Ciudad del Running. Ce dimanche, sous un soleil plus chaud qu’attendu, la Cité des Arts et des Sciences a vibré. Records nationaux, chronos stratosphériques, performances XXL chez les Français… récit d’un marathon (45e édition) qui restera dans les mémoires des passionnés de course à pied.
| John Korir, une masterclass et un negative split historique
Le Kényan a montré à Valence une maîtrise totale. Aligné sur le Marathon de Chicago en octobre dernier, John Korir avait pris de gros risques en partant sur les bases du record du monde. Résultat : il avait mis le clignotant peu avant le 30e km. À Valence, il a exécuté une stratégie de course bien différente en partant sur un rythme plus contrôlé. Son effort a finalement payer. L’athlète qui a tout juste fêter ses 29 ans a livré une véritable masterclass.
Dès les premiers kilomètres, les trois meneurs d’allure (Benson Tunyo, Francis Abong et Mako Ako) imposent une cadence régulière. Un groupe dense se constitue : Korir, Lemma, Kipkoech, Kangogo, Dida… passage au 5 km en 14’38. Juste derrière, un deuxième peloton très dense avec près d’une vingtaine de coureurs, dont le Français Nicolas Navarro, passe en 14’48.
Au 10 km, les leaders sont en 29’17, légèrement en retard sur le record du parcours. Mais la température monte et la prudence de départ va tout changer.
➜ Un semi prudent… avant l’attaque fulgurante
Le groupe de tête bascule au semi en 1h01’46, près de 1’10 de retard sur le record de l’épreuve. C’est le moment choisi par Korir pour montrer qu’il a retenu la leçon de Chicago : pas de folie, pas de tentative de record du monde, mais un contrôle total. Au 25e km, les pacers s’écartent… et Korir passe à l’offensive.
➜ Km 25–30 : la bascule
En cinq kilomètres, le Kényan fait exploser la course : +35 secondes d’avance sur les poursuivants. Sisay Lemma, le vainqueur de l’édition 2023 et recordman de l’épreuve (2h01’48) craque totalement. Derrière, le peloton se désagrège. Korir déroule une foulée puissante, stable, d’une efficacité chirurgicale. Un véritable plaisir à regarder pour les dizaines de milliers de spectateurs massés sur les côtés.
➜ Une fin de course d’anthologie
Sous un soleil de plus en plus présent, Korir continue d’accélérer. Le negative split est en marche. Il déboule enfin sur le célèbre tapis bleu et coupe la ligne en 2h02’24. En améliorant son record personnel de 20 secondes, il devient le 8e meilleur performeur de l’histoire. Un succès amplement mérité après une stratégie de course parfaitement exécuté : un premier semi en 1h01’47 et la deuxième partie en 1h00’37. Une véritable démonstration tactique digne des plus grands marathoniens de l’histoire.
« Je suis aux anges : j’ai décroché la victoire et signé le meilleur chrono de ma carrière. Après mon abandon à Chicago, j’ai choisi de croire en moi et de me fixer rapidement l’objectif de préparer Valence. Mon principal but aujourd’hui était de gagner, mais je savais que cela m’emmènerait sans doute vers un temps très rapide, donc je ne peux pas demander mieux. L’ambiance était exceptionnelle, le public m’a porté vers la victoire. »
John Korir, vainqueur du Marathon de Valence 2025
➜ Derrière lui, une pluie de records
Amanal Petros a été grand. L’athlète de 30 ans explose le record d’Allemagne : 2h04’03 et devient le 3e meilleur Européen de l’histoire. Comme aux Championnats du monde Tokyo en septembre, il décroche une 2e place qui a cette fois un goût de victoire. Le Norvégien Awet Kibrab complète le podium en 2h04’24, un chrono canon pour son premier marathon en carrière. Suguru Osako termine 4e et signe un nouveau record national du Japon en 2h04’55, battant d’une petite seconde l’ancienne marque de Kengo Suzuki. Encore dans le coup jusqu’au 25e km Sisay Lemma, l’un des grands favoris, n’a pas pu suivre la cadence imposée par John Korir. Il a été pris de vomissements pendant la course et a complètement explosé. L’athlète éthiopien termine en 2h08’57, bien loin de son niveau habituel. La dure loi du marathon.
La performance XXL du jour est signée Alex Yee. Le champion olympique de triathlon à Paris 2024 signe un incroyable 2h06’38 et prend la 7e place d’un des marathons les plus rapides du monde. Après des débuts remarqués sur la distance reine à Londres cette année (2h11’08), il confirme qu’il est un des athlètes les plus endurants de la planète. Avec cette performance, il devient le 2e meilleur performeur britannique de l’histoire, derrière la légende Sir Mo Farah (2h05’11).
Longtemps annoncé dans la start-list et auteur d’une préparation prometteuse, le vainqueur de l’UTMB 2025 Tom Evans n’a finalement pas pris le départ. Il a décidé de prendre une période de repos supplémentaire et de passer du temps en famille avant de lancer sa saison 2026.
Cette édition a offert un spectacle retentissant. Un marathon d’une densité rare, marqué par une explosion totale dans les derniers kilomètres, certainement la conséquence d’un mercure inhabituellement élevé pour Valence.
➜ Classement Top 10 – Hommes
1 – John Korir (Kenya) 2h02’24
2 – Amanal Petros (Allemagne) 2h04’03
3 – Awet Kibrab (Norvège) 2h04’24
4 – Suguru Osako (Japon) 2h04’55
5 – Gashau Ayale (Israël) 2h05’29
6 – Justus Kangogo (Kenya) 2h06’11
7 – Alex Yee (Royaume-Uni) 2h06’38
8 – Félix Bour (France) 2h06’41
9 – Filmon Tesfu (Pays-Bas) 2h06’42
10 – Gemechu Dida (Ethiopie) 2h06’45
| Les Français ont brillé
Malgré un soleil bien présent et une chaleur qui a impacté certains coureurs, les Tricolores sortent une copie impressionnante. Félix Bour bat son record de 4 petites secondes : 2h06’41. Il prend une prestigieuse 8e place et reste le 5e meilleur Français de l’histoire. Valentin Gondouin s’envole et met une claque à son ancien temps référence : 2h07’55, une performance remarquable. Nicolas Navarro, en difficulté, termine en 2h09’22, bien loin de ses ambitions. Pas de bonnes sensations dès le départ, ce n’était pas son jour. Mais il a quand même trouvé les ressources mentales pour aller jusqu’au bout des 42,195 km. Il reviendra plus fort en 2026. Bastien Augusto réussit ses débuts avec un chrono de canon de 2h09’36. Jason Pointeau réussit son pari fou de passer sous les 2h10 : 2h09’53.
À noter également la participation de la légende du demi-fond et du fond français Driss El Himer, il a terminé la course en 2h29’09. À 51 ans, il occupe toujours la 6e place au classement des Français les plus rapides de l’histoire sur marathon (2h06’48 au Marathon de Paris 2003).
| Joyciline Jepkosgei en patronne, record du parcours pulvérisé et meilleure performance de l’année
La course féminine a été tout aussi spectaculaire. Après un départ très rapide (5 km en 16’16), seule une poignée d’élites parvient à rester dans le groupe emmené par trois pacers et de nombreux coureurs amateurs masculins. Très vite, Amane Beriso, détentrice du record de l’épreuve, lâche prise. Le duel que tout le monde attendait peut commencer Peres Jepchirchir vs Joyciline Jepkosgei.
Un semi sur des bases historiques
Les deux championnes passent au semi en 1h06’34, soit 44 secondes d’avance sur le record de la course. Puis une longue bataille d’usure s’installe.
Km 36 : l’attaque décisive
Lorsque le groupe explose, Jepkosgei prend les commandes derrière le dernier pacer. Elle dépose progressivement Jepchirchir qui ne peut plus suivre la cadence. La Kényane accuse le coup, trois mois seulement après son sacre aux Mondiaux de Tokyo. La fin de course est somptueuse. Jepkosgei fonce vers le tapis bleu et arrache un chrono monumental : 2h14’00. 4e Meilleure performeuse de l’histoire, meilleur temps mondial de l’année et record du Marathon de Valence.
Jepchirchir suit en 2h14’43, meilleure performance personnelle, 6e meilleure performeuse de l’histoire. Deux femmes sous les 2h15 dans la même course : un fait rarissime. La Belge Chloé Herbiet complète le podium en 2h20’38 et explose le record national de Belgique, vieux de 23 ans. Derrière elle, la Finlandaise Alisa Vainio signe un nouveau record national de Finlande. Un autre record national est tombé quelques secondes plus tard, celui d’Australie. Jessica Stenson n’a pu retenir ses larmes après avoir franchi la ligne d’arrivée en 2h21’24.
Classement Top 10 – Femmes
1 Joyciline Jepkosgei (Kenya) 2h14’00
2 Peres Jepchirchir (Kenya) 2h14’43
3 Chloe Herbiet (Belgique) 2h20’38
4 Alisa Vainio (Finlande) 2h20’48
5 Jessica Stenson (Australie) 2h21’24
6 Glenrose Xaba (Afrique du Sud) 2h23’22
7 Isobel Batt-Doyle (Australie) 2h23’35
8 Lonah Salpeter (Israël) 2h23’45
9 Meritxell Soler (Espagne) 2h23’49
10 Natasha Wilson (Royaume-Uni) 2h24’21
« Je suis tellement heureuse. Je n’arrive pas à croire que j’ai gagné ici. Valence me porte décidément chance, puisque j’y avais déjà établi un record du monde du semi-marathon il y a quelques années. Je suis ravie d’avoir amélioré mon record personnel d’une marge aussi importante. »
Joyciline Jepkosgei, vainqueure du Marathon de Valence 2025
| Les Françaises ont aussi rayonné sur le tapis bleu
Le contingent tricolore féminin repart de Valence avec une moisson de records personnels et des performances inspirantes. Inès Hamoudi explose son record de près de quatre minutes et entre dans le top 20 de la course : 2h27’36. Héloïse Laigle, pour son premier marathon, signe un remarquable 2h28’04. La Lorraine Émilie Jacquot-Claude termine en 2h32’06, à quelques secondes de son RP. Manon Coste réalise l’une des plus belles progressions du jour : 2h32’46, RP amélioré de près de 10 minutes ! Augustine Emeraux bat également son record personnel en 2h34’06. Anaïs Quemener, dix mois seulement après son accouchement, réussit un superbe retour en 2h37’48. Toutes ces performances confirement une dynamique hyper positive pour le marathon français au féminin.
Le Marathon de Valence, une densité exceptionnelle
- 4 coureurs sous les 2h05
- 32 coureurs sous les 2h10
- 148 coureurs sous les 2h20
- 507 coueurs sous les 2h30
- 5 283 coureurs sous les 3h (16,9%)
- 30 523 finishers
Entre negative split historique, records nationaux, duel féminin titanesque et performances françaises de haut vol, l’édition 2025 du Marathon de Valence restera comme l’une des plus denses et spectaculaires jamais vues. Valence confirme encore son statut de Marathon Mondial de la Performance. Malgré une météo légèrement plus chaude qu’habituellement, le spectacle a été au rendez-vous avec des performances de haut vol. Joyciline Jepkosgei et John Korir confirment leur statut de superstar du marathon. L’avenir leur appartient.
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Clément LABORIEUX
Journaliste
