Mariko Yugeta

Le marathon après 60 ans : moins de volume, plus de malice

Conseil
18/09/2025 14:58

Courir un marathon après 60 ans n’a plus rien d’une exception. De plus en plus de coureurs franchissent cette barre symbolique en gardant l’envie de se frotter aux 42,195 km. L’âge apporte son lot de défis comme la récupération plus lente, métabolisme en mutation, muscles moins explosifs mais aussi une richesse inestimable : l’expérience. Alors, comment adapter son entraînement, son alimentation et sa récupération pour continuer à performer et, surtout, prendre du plaisir ?


| Entraînement : trouver le juste tempo

Passé 60 ans, la clé réside dans l’équilibre. L’erreur serait de croire qu’il faut lever totalement le pied et s’en tenir à des footings tranquilles. Le marathon demande toujours un socle solide : sorties longues régulières, travail d’allure spécifique, un peu d’intensité pour réveiller la machine. La nuance, c’est que la récupération entre deux séances devient le nerf de la guerre. Là où un coureur de 30 ans enchaîne trois séances dures dans la semaine, un sexagénaire privilégie la qualité plutôt que la quantité.

Parmi les exemples marquants, Mariko Yugeta, première femme sexagénaire à passer sous les 3 heures au marathon, illustre parfaitement ce principe. À 60 ans passés, la Japonaise boucle encore la distance en 2h52. « L’âge ne doit pas être une excuse, il impose juste une préparation plus intelligente », avouait-elle au Guardian. Son approche repose sur des sorties calibrées, de l’intensité mesurée et beaucoup de régularité, plutôt que sur le volume maximal.


En sortie longue, Mariko montre que discipline et plaisir se conjuguent parfaitement après 60 ans. © Abbott World Marathon Majors

Les fractionnés conservent leur utilité, mais sous une forme adaptée : 200 ou 400 mètres pour garder de la vitesse, ou des blocs de 1 000 à 2 000 mètres à allure marathon pour caler le rythme, plutôt que des séances trop longues et exigeantes. Les côtes, elles, deviennent des alliées précieuses : travailler la puissance sans taper trop fort sur les articulations. L’idée est simple : continuer à progresser sans user inutilement l’organisme.

| La musculation, nouvel indispensable

Avec l’âge, la fonte musculaire s’accélère, et courir seul ne suffit plus à entretenir la force nécessaire pour encaisser un marathon. Le renforcement devient une assurance : gainage pour stabiliser la foulée, exercices pour quadriceps, ischios et fessiers afin de prévenir les blessures, travail de proprioception pour garder une bonne coordination.

Jeannie Rice, 77 ans et détentrice de plusieurs records dans sa catégorie, montre, elle, comment l’entraînement global peut prolonger la carrière et s’était également confié au Guardian : « Je veux montrer que l’âge ne doit pas être une barrière. » Deux fois par semaine, 30 minutes suffisent pour améliorer la foulée, protéger les articulations et rester compétitif.

| L’assiette du marathonien sexagénaire

Le métabolisme change avec l’âge et les besoins en protéines augmentent pour préserver la masse musculaire. Les glucides restent indispensables, mais mieux vaut privilégier les versions complexes (pâtes complètes, riz basmati, patates douces) pour maintenir une énergie stable et éviter les pics digestifs. L’expérience permet d’anticiper ce que l’estomac tolère ou pas, un atout crucial après 60 ans. L’assiette idéale se compose de 50 % de glucides complexes (pâtes complètes, riz, quinoa), 25 % de protéines maigres (poisson, poulet, œufs ou alternatives végétales) et 25 % de légumes pour vitamines, minéraux et fibres. Ces proportions permettent de maintenir un apport énergétique stable, essentiel sur la distance.

| Hydratation : l’angle mort à surveiller

Avec l’âge, la sensation de soif diminue. Pourtant, sur marathon, la déshydratation reste un piège redoutable. Boire à intervalles réguliers, même sans ressentir de soif, devient indispensable. Alterner eau et boisson énergétique permet de maintenir l’équilibre en électrolytes et d’éviter crampes ou coups de mou. « Eliud Kipchoge boit du Maurten (boissons et gels énergétiques), donc je l’ai utilisé à Osaka pour la première fois, indiquait Mariko Yugeta à nos confrères de Runners World. Quand vous visez un record du monde, vous devez étudier ce que font les meilleurs et chercher ce que vous pouvez appliquer à votre propre course. »


Jeannie Rice franchit chaque kilomètre avec détermination : 77 ans et des records dans la foulée. © TIM SHORTT/ FLORIDA TODAY / USA TODAY NETWORK

| La récupération, pièce maîtresse

À 60 ans et plus, la récupération ne doit plus être perçue comme une option, mais comme une composante centrale de la performance. Sommeil de qualité, siestes après les séances dures, auto-massages, marche active ou yoga : autant de leviers pour prévenir les blessures et accélérer la régénération. Jeannie Rice soulignait l’importance de ce point au Washington Post : « Je suis simplement une personne normale, ordinaire. Je ne fais rien de spécial, je suis juste chanceuse et bénie. » L’écoute du corps devient stratégique, chaque signal de fatigue ou de douleur mérite attention.

Et ce n’est pas qu’une question de femmes. Du côté masculin, certains coureurs ont également marqué les records après 60 ans grâce à la capacité à récupérer efficacement entre les séances, clé pour prolonger la carrière et éviter les blessures à un âge avancé. L’Irlandais Tommy Hughes a couru un marathon en 2h30’02 à plus de 60 ans, établissant un record mondial pour sa catégorie. Derek Turnbull (Nouvelle-Zélande) a, lui, terminé le marathon de Londres en 2h41’57 à plus de 65 ans, cumulant plusieurs performances de haut niveau dans sa catégorie d’âge. Quant à Ed Whitlock (Canada), il est devenu le premier homme de plus de 70 ans à descendre sous les trois heures sur marathon, avec 2h59’10, et avait déjà couru un marathon en 2h52’47 à 69 ans.

| Le mental, arme secrète

L’expérience devient le plus grand atout. Les sexagénaires savent gérer les moments de creux, relativiser les secondes perdues et transformer l’effort en plaisir. Le mental compense largement les secondes perdues physiologiquement et transforme la course en célébration plutôt qu’en lutte contre le temps. Le marathon reste une épreuve de tête autant que de jambes. Et là, l’expérience joue un rôle décisif. Les sexagénaires ne se laissent plus piéger par l’euphorie du départ, savent gérer les moments de creux et relativisent les secondes perdues. La motivation n’est plus uniquement dictée par le chrono, mais aussi par le plaisir de partager un défi, de se prouver qu’à 60 ans passés, on peut encore boucler un marathon avec le sourire.

Courir un marathon après 60 ans n’est pas un exploit isolé. C’est le résultat d’une préparation intelligente, d’une alimentation adaptée, d’une récupération priorisée et d’un mental affûté par des années de pratique. Chaque kilomètre devient une victoire, chaque arrivée une célébration. Et sur la ligne, le message est clair : l’âge ne fixe pas les limites, il redéfinit simplement la manière de les dépasser.


Dorian VUILLET
Journaliste

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