Marie Bouchard, athlète et interne en MPR, nous livre son sentiment général : "J'ai de la chance de ne pas avoir de problème de sommeil. Je ne pense pas qu'il y ait des conseils différents à donner pour la population générale ou pour des coureurs. En revanche je suis sûre que le sport aide à bien dormir car qui dit sport dit plus grande dépense d'énergie et donc le corps aura naturellement envie/besoin de se reposer derrière pour bien récupérer. Une alimentation équilibrée permet également de jouer sur le sommeil, par exemple, prendre un repas un peu plus léger le midi permet de diminuer le coup de barre post prandial des gros repas. Bien boire en journée et moins le soir permettra d'éviter les réveils nocturnes pour boire ou aller aux toilettes." © STADION-ACTU

Sommeil : Morphée et la course à pied

Conseil
16/07/2025 23:04

Une question commune se pose : les marathoniens, et plus généralement les coureurs réguliers, dorment-ils mieux que les sédentaires ? La relation entre course à pied et sommeil est complexe, oscillant entre bénéfices évidents et effets paradoxaux. D’un côté, l’activité physique modérée favorise un sommeil profond et réparateur. De l’autre, le surentraînement ou le stress pré-compétition peuvent perturber les nuits. Plongeons dans les bras de Morphée, avec la contribution de Marie Bouchard, athlète de haut niveau et interne en Médecine Physique et Rééducation (MPR).

| Course à pied et sommeil profond : le duo gagnant ?

Le sommeil profond est la phase la plus réparatrice du cycle, essentielle pour la récupération musculaire et la consolidation de la mémoire. De nombreuses études suggèrent que l’exercice aérobie, comme la course à pied, augmente sa durée. Ainsi, une étude de 2017 d’Alexandra Kredlow, actuellement chercheuse à Harvard, montre qu’une activité physique régulière améliore la qualité du sommeil, notamment en augmentant le temps passé en sommeil lent profond. Et inversement : un bon sommeil renforce le corps. En 2020, une autre étude (menée par B.A. Dolezal) a observé que les coureurs modérés (30-45 min, 3-4 fois/semaine) présentaient une meilleure architecture de sommeil que les sédentaires, avec moins d’éveils nocturnes. Dans un premier temps, la lecture des études en ligne montre que les liens entre exercice physique et sommeil existent dans les deux sens. 

Quant aux effets sur le sommeil d’une séance ­d’activité physique « aiguë », ils sont, toujours d’après l’analyse des auteurs américains, modestes et d’une fiabilité variable sur le plan scientifique. Bonne nouvelle, contrairement à ce qui a longtemps été dit, il n’est plus déconseillé de faire du sport dans les heures précédant le coucher. Les séances tardives étaient suspectées d’altérer le sommeil et en particulier d’accroître le temps d’endormissement, mais des travaux récents ne confirment pas ces perturbations, du moins chez des bons dormeurs. Il est simplement conseillé de faire des séances plus légères le soir. 

Marie Bouchard (en photo), athlète et interne en MPR, nous livre son sentiment général : « J’ai de la chance de ne pas avoir de problème de sommeil. Je ne pense pas qu’il y ait des conseils différents à donner pour la population générale ou pour des coureurs. En revanche je suis sûre que le sport aide à bien dormir car qui dit sport dit plus grande dépense d’énergie et donc le corps aura naturellement envie/besoin de se reposer derrière pour bien récupérer. Une alimentation équilibrée permet également de jouer sur le sommeil, par exemple, prendre un repas un peu plus léger le midi permet de diminuer le coup de barre post prandial des gros repas. Bien boire en journée et moins le soir permettra d’éviter les réveils nocturnes pour boire ou aller aux toilettes.« 

© STADION-ACTU

| Le rôle du système nerveux parasympathique

Le système nerveux parasympathique joue un rôle clé dans la récupération et l’équilibre physiologique, notamment après un effort modéré. Il favorise un retour au calme en ralentissant le rythme cardiaque, en stimulant la digestion et en abaissant la tension artérielle, ce qui facilite l’endormissement et améliore la qualité du sommeil. Cette branche du système nerveux autonome, associée au repos et à la digestion, s’active principalement grâce au nerf vague, dont l’influence s’étend du cœur aux systèmes digestif et immunitaire. Les études montrent qu’un effort intense comme un marathon ou une séance de fractionné prolonge l’excitation du système sympathique, avec des taux élevés d’adrénaline et de cortisol, retardant ainsi la transition vers un état de détente. D’où le conseil de séances légères en soirée ! Pour optimiser la récupération, il est conseillé d’éviter les entraînements trop tardifs, de modérer le volume avant une compétition et d’adopter une hygiène de vie adaptée : heure de coucher régulière, nutrition post-effort privilégiant protéines et glucides complexes, et hydratation maîtrisée en soirée. Les micro-siestes, quant à elles, constituent un outil précieux pour les sportifs, permettant une récupération nerveuse sans empiéter sur le sommeil nocturne, grâce à leur durée brève et ciblée. En intégrant ces pratiques, le coureur maximise les bienfaits du parasympathique, essentiel à la performance et à la régénération de l’organisme. 

Quid de l’activité physique en cas de troubles du sommeil ? S’agissant de l’insomnie, dont les formes sévères concernent plus de 10 % de la population, les études ne sont finalement pas si nombreuses. En juillet 2024, une étude japonaise a été effectuée sur près de 600 personnes. « Nos résultats suggèrent que les effets de l’exercice physique sur le sommeil sont meilleurs chez des personnes avec insomnie que dans d’autres populations », concluent les auteurs, qui plaident pour que cette ­intervention non médicamenteuse ait sa place dans les recommandations de bonne pratique concernant l’insomnie.

Gardez en tête que c’est durant notre sommeil que nous allons analyser, emmagasiner les informations qui nous sont parvenues durant la journée. Votre cerveau se régénère au même titre que le reste de votre organisme, mais il ne cesse pas pour autant de fonctionner. Il va notamment opérer un travail de mémorisation.

| Marathon et sommeil : l’effet paradoxal

De nombreux coureurs témoignent d’un sommeil réparateur après un long run hebdomadaire. Pourtant, à l’approche d’un marathon, les nuits blanches ne sont pas rares. Si le coureur du dimanche peut bénéficier des bienfaits de son activité physique pour dormir comme un loir, l’effet du sport sur le sommeil est parfois inverse pour un marathonien. Entre le stress et l’excitation, le sommeil des coureurs peut être altéré avant une compétition. Une étude datant de 2019 a ainsi révélé que 70 % des athlètes d’endurance souffrent de troubles du sommeil avant une compétition, à cause du cortisol et de l’anxiété ! Marie Bouchard abonde dans ce sens mais relativise à sa manière : « C’est certain que les nuits d’avant compétitions sont souvent les moins bonnes du fait de l’excitation de l’événement, mais avec mes semaines bien chargées je n’ai plus du tout ce « problème » là. Au contraire, je crois que je profite des week-ends de compétition pour me reposer ! L’entraînement des nuits de gardes y est sans doute pour quelque chose car on ressasse les dossiers des patients que l’on a vu, on est sur le qui-vive et donc le sommeil n’est pas très bon… donc oui, la gestion du stress est un des point clé du sommeil« . Et attention également à la surcharge d’entraînement, qui entraine fatigue chronique… et insomnies.

Le plus important pour analyser ses besoins et a fortiori son sommeil, c’est de bien se connaître. En s’écoutant et en comprenant au mieux le fonctionnement de son corps, il est plus aisé de repérer les signes d’un manque de sommeil. Par exemple, si vous manquez d’engagement pour aller vous entraîner, que vous perdez en explosivité, que vous êtes de plus irritables voire déprimés, cela peut être en partie dû à un manque de sommeil. Quelques conseils encore distillés par Marie Bouchard, dont le travail d’interne vient complexifier les nuits : « En lendemain de garde (souvent des journées de 25h avec 2-3h de sommeil max), je dors dès que possible en évitant de scroller sur le portable. Souvent je dors de 11h à 16/17h puis je pars courir un footing aérobie et je redors sans problème une nuit complète derrière. Je dors TOUJOURS avec des bouchons d’oreilles même lorsque c’est calme, ça me met dans ma bulle. Dans l’idéal également : température de chambre assez fraîche et si possible qu’il fasse nuit noire”

Le diable s’habille peut-être en Prada, mais il se cache surtout dans les détails. 

Et chuuuuuut, écoutez votre corps…


Charles-Emmanuel PEAN

Charles-Emmanuel PEAN
Journaliste

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