Emmanuel Bonnier, recordman du marathon couru en pyjama
Emmanuel Bonnier, troisième du Grand Raid de l’Ultra Marin (175 km) fin juin, poursuit une ascension aussi improbable que fulgurante. Nouveau détenteur du record du monde du marathon couru en pyjama (2 h 42), le sociétaire de l’Entente Angevine Athlétisme ne compte pas s’arrêter là. Prochain objectif, représenter la France aux Championnats du Monde des 24 heures à Albi, en octobre prochain. Portrait d’un père de famille épanoui, qui conjugue exploits décalés et performances de haut vol.
Il n’est pas venu en costume trois pièces. Rassurez-vous. Le Parc Saint Nicolas à Angers en visuel depuis sa fenêtre, Emmanuel Bonnier avait son point de rendez-vous tout trouvé. Tee-shirt Sunday Runners sur le dos, groupe qu’il a co-fondé au service des enfants, le vainqueur de l’Ultra-Trail de l’île d’Oléron 2025 (7h52) s’est depuis février dernier lancé à 100% dans la gestion de ses biens immobiliers. Une libération. « Je suis 100 fois plus épanoui. J’ai beaucoup moins de pression », reconnaît celui qui a commencé la course à pied en 2017 après un challenge donné par ses frères Steeve et Yohan. Un nouvel environnement qui lui permet de faire valser les chronos et démentir ses haters.
Ses défis improbables, le Ligérien les doit à Guillaume de Lustrac, recordman du monde du marathon couru en marche arrière (3h25). « J’étais impressionné. C’est fou qu’il termine devant des mecs qui s’entraînent pendant huit mois. » Le déclic. « J’ai regardé les records qui existaient. Je voulais battre les plus difficiles. » Les 42,195 km avalé en costume trois pièces lui mettent la puce à l’oreille. « J’ai fait trois sorties longues en condition de 30 à 35 minutes. La première fois, j’ai déchiré les manches », se souvient-il. « Ça brulait. » Flashé en un peu moins de 2 h 41, l’ancien commercial avait réussi son pari le 20 septembre 2023 à Tours. Depuis, sa marque de référence a été effacée par Soh Rui Yong dans la capitale Londonienne en 2h39’57 cette année. Comptez sur lui pour récupérer sa couronne… dès 2026.
Un de perdu, un de retrouvé. Le 11 mai, le vainqueur de Tout Angers Bouge 2023 s’est adjugé un nouveau record du monde couru… en pyjama. « J’ai fait ma demande 30 jours auprès du Guinness avant la course. Généralement, le délai est de 3 mois », détaille celui qui détient un record sur 10 km en 32’21. « J’ai acheté ce qu’il fallait la veille au soir. » Sous les yeux de sa femme Latifa et de son rayon de soleil Noam, deux ans et demi, le lauréat du Trail des Pays de Monts 2025 a retranché plus de quatre minutes au Britannique Julian Rendall (2 h 42’37 contre 2 h 46’46). « C’était beaucoup moins sérieux, davantage une formalité. » Une sortie longue dans sa préparation pour le Grand Raid de l’Ultra Marin (175 km, 1 400 m D +). Nous l’avions rencontré huit jours avant ce grand objectif. Depuis, le fondeur au près de 5000 abonnés sur Instagram a accroché une convaincante troisième place dans le Morbihan en 15 h 52’16, devancé seulement par Gwenael Helleux (14 h 59’19) et Romain Louis (15 h 20’36).
Une performance qui pourrait lui ouvrir les portes de l’équipe de France pour les Championnats du monde de 24 h à Albi en octobre. « J’aurais pour ambition de viser les plus de 255 km« , précise celui qui est à 36 battements par minute au repos. Il entend bien en fin d’année casser la barre des 2 h 25 au Marathon de Valence, quatrième marathon le plus rapide au monde, alors qu’il avait claqué un chrono intéressant de 2 h 27’46 l’an passé dans cette même ville espagnole réputée pour ses innombrables parcs. Vers 9 h 30, sous une chaleur de plomb, après 45 minutes d’entretien, Emmanuel Bonnier s’élançait sur son terrain de jeu favori pour une sortie de 20 bornes, à 15 km/h sans coupure, avant de s’envoler pour Lyon retrouver ses amis. Le défi donné par ses frangins a pris une tournure inespérée. Magique même.
À 37 ans, l’Angevin ne cesse de franchir les paliers. À l’écouter, on serait tenté de dire qu’il est encore loin de son potentiel et que le meilleur reste à venir. Alors qu’il a découvert la discipline depuis huit ans, l’homme aux défis loufoques rêve d’enfiler le maillot tricolore. Réponse d’ici quelques mois…

Renaud Chevalier
Journaliste