Gilbert Dantzer, alias « Jésus » : plus de 350 marathons déguisés à son actif
Il y a ceux qui courent après le temps, et puis il y a Gilbert Dantzer. À 68 ans, cet habitant de Houilles ne chasse ni les records ni les podiums. Depuis plus de 25 ans, l’homme sillonne les marathons du monde entier déguisé en Jésus, une croix de 2,3 kg solidement fixée sur le dos. Il a, en tout, terminé près de 350 marathons et 1500 courses.
On dit souvent que Jésus est né au temps du roi Hérode. Pourtant, celui-ci est apparu quelque part avant 1998, lors d’un des marathons les plus festifs de France : « Ça fait au moins 27 ans que je cours déguisé en Jésus. J’ai oublié la date de mon premier marathon, mais je sais que c’était au Médoc », explique Gilbert Dantzer. Bien qu’insolite, l’histoire est simple. C’est un ami qui lui donne l’idée du costume. « Un jour, il m’a dit qu’avec mes yeux et mes longs cheveux, je ressemblais à Jésus. J’ai pris ça au sérieux : je me suis déguisé, et tout le monde a adoré ». Depuis, son costume est devenu indissociable de sa silhouette.
| « Je ne veux pas provoquer »
La conviction principale de Gilbert Dantzer est de « faire marrer les autres ». Le bon vivant rencontre constamment un public bienveillant. Rares sont les critiques qui lui sont adressées, même si quelques personnes crient au blasphème : « Certains spectateurs m’ont dit que j’étais irrespectueux et que je devais retirer mon déguisement. Pour moi, c’est comme me déguiser en homme politique ». Mais ce n’est rien face à l’ovation du public : « J’ai un accueil de roi à chaque fois. Les spectateurs m’acclament et attendent Jésus sur la course. Il aiment ce côté insolite ». Tout le monde se prête au jeu, notamment les organisateurs qui lui réservent presque systématiquement le dossard 33 : « C’est l’âge du Christ à sa mort, c’est un clin d’œil amusant. J’ai déjà doublé son âge, alors j’ai de la chance (rires) ».
Le coureur veille toutefois à mettre de l’eau dans son vin lorsqu’il s’agit de respect. À Rome, il a choisi de troquer sa croix contre un costume tahitien : « Je ne veux pas provoquer. Bien que je sois catholique, il faut respecter certains endroits. Jésus est mort sur la croix, mais moi, je n’ai pas trop envie quand même », plaisante-t-il.

« Je ne veux pas provoquer. Bien que je sois catholique, il faut respecter certains endroits. »
Gilbert Dantzer
En un quart de siècle, l’homme à la croix a parcouru plus de 10 000 kilomètres de bitume et a fait le tour du monde. Alors des anecdotes, Gilbert Dantzer en a à profusion. Le genre de récits qui n’arrivent qu’à peu de gens sur terre, à part à Jésus. Le plus célèbre ? Celui du Marathon du Beaujolais, lorsqu’il casse sa croix en descendant dans une cave. Il raconte : « Je me dis : bon, j’abandonne parce que courir torse nu sans la croix, ça n’a aucun intérêt. Et là, un des organisateurs, qui était chirurgien, me fait une ‘réparation chirurgicale’ au gros scotch pendant quinze minutes. J’ai bien failli perdre mon identité dans cette cave mais on a bien ri ! ».
| Un record personnel à 2h52
Derrière le déguisement, Gilbert Dantzer est un vrai coureur d’expérience. Son record personnel sur marathon est de « seulement » 2h52. Stratosphérique pour quelqu’un qui n’a jamais suivi d’entraînement : « Je n’ai jamais pris ça au sérieux. Aujourd’hui, je fais les marathons en 5h30 ou 6h00, et je suis heureux comme ça. J’aime la fête, les copains, les ravitaillements. Je pense que plus jeune je valais 2h40, mais ça ne m’intéressait pas ». Pour lui, le marathon n’est pas une privation, mais un partage : « Avec mes amis, on ne se prive de rien. La veille d’une course, on fait la fête, et ça ne pose aucun problème ».

| « Je continue tant que je peux »
Malgré ses modestes 350 marathons, Gilbert Dantzer garde des rêves plein la tête. Son objectif : courir le Marathon de Tahiti ou celui de Londres. Mais le coureur est rattrapé par la réalité de sa faible retraite, et son alter ego de Nazareth ne lui rapporte pas grande offrande. Courir à travers le monde coûte cher, l’homme dort souvent dans son camion et sillonne les routes tous les week-ends : « Je continue tant que je peux. Même si je suis souvent invité, il faut payer les déplacements, les logements, les repas. Cette aventure représente des milliers d’euros de frais personnels, je ne suis parfois pas contre une aide de la part des organisateurs qui m’invitent ». Illustre-t-il avec reconnaissance.
Après 1500 courses au compteur, Gilbert Dantzer n’ a pas encore fait la croix sur la course à pied. Bien que les articulations soient un peu usées, il prépare le Marathon d’Athènes et le Marathon du Beaujolais. Et quand viendra le temps de raccrocher les baskets et ranger son costume, il sait déjà où il ira : « Je ferai du bénévolat. J’irai de l’autre côté du ravitaillement ».
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La rédaction