Olivier Maria : « Fier de courir un marathon en sandales »
On a découvert le « personnage » Olivier Maria sur un rond point de Lille. En y regardant de plus près, on s’est aperçu que ce passionné de course à pied et de vélo courait en sandales lors de ce marathon un peu fou. Alors, on a eu envie d’en savoir un peu plus sur la philosophie d’Olivier derrière des apparences ludiques et légères. À la découverte d’un certain minimalisme, qui n’empêche pas le sportif de voir grand : en octobre prochain, il se lancera dans un défi Dunkerque – Marseille !
À tout phénomène son pendant opposé. La course à pied est un marché qui explose, la course aux équipements s’est imposée. La majorité des coureurs sont (richement) équipés. Il est apparu en opposition à cet élan une autre école : les minimalistes. On les appelle aussi les « naked runners » selon un article de l’équipe.fr publié durant le mois d’août. Olivier Maria n’a pas attendu que le phénomène soit nommé pour adopter des usages plus sobres. Et pour appuyer sa démarche, il effectuera un singulier Dunkerque – Marseille dans quelques semaines.
| Olivier, comment êtes-vous devenu ce coureur passionné ?
J’ai commencé à courir il y a 10 ans, à la fin de mes études. J’ai débuté à Grenoble, dans ma dernière année d’étude. C’est un pote qui m’a proposé d’aller courir en montagne. Pour moi à l’époque ce n’était pas possible de « courir » en montagne (rire). J’ai essayé avec lui et je suis tombé amoureux direct. J’ai commencé par les distances classiques, 10 km, semi, puis j’ai augmenté la cadence. J’étais vraiment très intéressé par le sujet, je lisais tout ce que je pouvais, notamment sur la nutrition. Le sujet continue de me passionner (ndlr, Olivier a publié un livre sur le sujet, Performer en mode cétogène). Comme je savais que j’allais quitter Grenoble, j’en ai beaucoup profité la dernière année, j’ai eu une vraie boulimie de trail. Une fois que je me suis retrouvé à Lille j’ai du réinventer, reprendre la route. Dans le même temps j’ai découvert, ou plutôt redécouvert, le vélo.
| Et là, un autre « flash » ? Que cherchez-vous dans la longue distance ?
Oui, énorme ! J’ai découvert le cyclisme longue distance et ça a accroché direct. À la base, il y a une blessure. C’est en 2020. Je me préparais pour le Marathon de Valence et j’ai forcé. J’ai contracté une fracture de fatigue, j’ai couru blessé quand même, la cata. Pour continuer à faire du sport j’ai pris un vélo. Et très vite je me suis retrouvé sur la course Race Across France, que j’ai fait deux fois. À l’époque j’aime tellement rouler que j’avais arrêter de courir. Depuis je fais les deux activités en parallèle. Plus c’est long, plus c’est bon. Sur une longue distance, tu traverses pleins de phases différentes. C’est hyper intéressant mentalement de passer beaucoup de temps dans l’effort. Tu dois gérer tellement de choses, sommeil, siestes, alimentation. Et puis voir tous ces paysages défiler.
« Plus c’est long, plus c’est bon »
Olivier Maria
| Sur le Réel Instagram de votre marathon sur le rond point de la porte de Paris, on vous voit courir en sandales. On est curieux…
Disons que les sandales font partie de mon cheminement. J’ai toujours été sensible à la sobriété. Cela fait des années que je cours avec cet équipement. C’est à l’époque où je me suis intéressé en profondeur au sujet de la course à pied que j’ai découvert cette pratique, à travers un article de la « Clinique du Coureur ». Il était indiqué qu’il ne fallait pas attendre vingt ans de course à pied pour corriger certaines postures et essayer les sandales. Cela m’a convaincu. La lecture du livre Born to run de Christopher McDougall a été déterminante aussi. Je cours en Panta sandals aujourd’hui. Pour la petite histoire, cet été, j’ai été rendre visite au créateur de la marque avec un Lille – Amsterdam, 300 kilomètres aller et retour en sandales. L’atelier se situe à Haarlem.
| Au-delà de l’aspect éthique, vous y retrouvez-vous en termes de performance ?
À mon petit niveau je pense que oui ! J’ai fait mon premier marathon en dessous de 3h00 (2h58’18) en 2023, équipé de Monk Sandals, ma première paire. Peut-être que je pourrai aller plus vite en chaussure carbone mais je suis très heureux comme ça. Fier de courir un marathon en sandales même. Pourtant, comme tout le monde, j’ai l’objectif d’aller le plus vite possible quand je fais une course. Le fait de ne pas faire des chronos « degueu » ça fait parler, réfléchir. Je sais que ça fait réagir le public et les coureurs. Courir en sandales c’est une approche singulière. On doit adapter sa foulée, la rendre plus légère et plus courte, augmenter la cadence. Tu dois corriger la longueur de foulée car on attaque moins le talon. Le corps s’adapte vite. Et depuis cinq ans, aucune blessure.
| Le cœur du projet « la France en courant« , c’est de sensibiliser au sujet de la sobriété ?
Oui, et les sandales sont de bonnes ambassadrices pour débuter. Cela rend curieux les gens qui me croisent, et les porter est plus fort que d’en parler. J’ai envie de crier au monde courez en sandales, comme j’ai envie de crier au monde ne prenez pas l’avion ! Mais c’est souvent contreproductif de “vendre” quelque chose. Les gens se posent des questions par eux-mêmes. Je suis là pour mettre la petite graine, et encourager aux aventures sans dossard. Avec ce Dunkerque – Marseille, que je courrai évidémment en sandales, mon objectif est de montrer que l’aventure ne nécessite pas forcément de traverser le globe en avion. Je trouve intéressant de prendre conscience que l’on est pas obligé de partir loin pour faire des belles courses. Elle se trouve devant sa porte. On peut inventer ses règles du jeu. Ouvrir une nouvelle voie, empreinte de liberté. Après attention je ne veux faire de leçon à personne. On est tous en prise avec nos contradictions. J’ai eu la chance de disputer l’UTMB en 2024 et c’était un évènement pour moi, par rapport à tout ce qu’il représente. Pourtant il y a pleins de choses dans lequel je ne me retrouve pas une fois sur place. Le côté marchand notamment…
