Quatrième du marathon des Jeux paralympiques de Paris (T12) en 3h13'50, 32 ans après les JO de Barcelone 1992 avec les valides, Rosario Murcia-Gangloff se prépare pour ceux de Los Angeles. Alors qu'elle a porté plainte contre son club d'athlétisme de Béziers (BCAM) en novembre 2024, la doyenne de la délégation tricolore est déjà rivée vers le futur, avec des projets à foisons. © CNOSF / KMSP

L’athlète paralympique Rosario Murcia-Gangloff déjà rivée vers Los Angeles 2028

InterviewMarathon
23/07/2025 20:24

Quatrième du marathon des Jeux paralympiques de Paris (T12) en 3h13’50, 32 ans après les JO de Barcelone 1992 avec les valides, Rosario Murcia-Gangloff se prépare pour ceux de Los Angeles. Alors qu’elle a porté plainte contre son club d’athlétisme de Béziers (BCAM) en novembre 2024, la doyenne de la délégation tricolore est déjà rivée vers le futur, avec des projets à foisons.


Elle en a encore des frissons. Au pied du podium lors des Jeux paralympiques de Paris le 8 septembre 2024, la Lyonnaise, figure du demi-fond français dans les années 1990 (28 sélections) est longuement revenue par téléphone en revenant de son entraînement sur sa passion pour la course à pied, sa philosophie de vie, ses derniers résultats… Le tout à bientôt 61 ans s’il vous plait.

| Rosario, près d’un an après les Jeux paralympiques, quels souvenirs gardez-vous ?

Les souvenirs de Paris, c’est gravé au plus profond de mon cerveau. Ça a été un tel engouement. Pourtant j’ai fait Barcelone (en 1992). C’était déjà magique, parce que c’était tellement bien organisé. C’était beau. Mes premiers Jeux. Mais je peux vous assurer, à Paris, en dehors du fait que je suis handicapée maintenant, c’était incroyable. Les gens étaient extraordinaires. Ils étaient heureux. On a totalement oublié ce qu’il se passait dans le monde. Ça va être difficile derrière de faire mieux. Il y avait une parité entre les handicaps et les valides, pas de discrimination. C’est très dur pour ceux qui sont atteints d’handicaps dans le sens où il n’y a pas d’aide financière. Il faut trouver un lieu pour s’entraîner. Il y a une nostalgie qui se crée. Je suis allée il n’y a pas très longtemps sur Paris parce que mon mari travaille sur Paris et il est comédien. On a refait une partie des Champs-Élysées. Ça m’a donné la chair de poule.

| À vous entendre, c’était même mieux que vos premiers Jeux olympiques…

C’est différent parce qu’à Barcelone, j’étais plus jeune. Pour tout athlète, quelle que soit la discipline, l’objectif c’était les Jeux. Qu’on soit devant ou derrière. C’était chez mes parents parce que je suis fille d’immigré. Mon papa est de Barcelone. Ma grand-mère habitait encore dans cette ville à l’époque. Elle n’est plus là mais j’allais manger chez elle. Je faisais 600 m à pied, j’étais chez elle. Tout était magique pour moi à cette époque-là. Pour nous, ça paraissait normal parce qu’on est sportif de haut niveau. Mais quand vous prenez du recul avec 30 ans de plus, avec plus de sagesse, moins de fougue qu’à l’époque, je ne sais pas comment vous le décrire. C’était magique.

| Timothée Adolphe, double vice-champion paralympique à Paris (100 et 400 m), a affirmé que l’héritage des Jeux n’avait pas eu lieu. Vous confirmez ?

Je comprends ce que dit Timothée. Je le comprends très bien parce que c’est vrai qu’on pourrait en parler un peu plus des handicapés. Mais ce qu’il ne faut pas oublier, c’est que si vous regardez il y a encore cinq ans ou même une dizaine d’années, le handicap n’était pas connu. On n’en parlait pas. Il n’y avait pas de publicité. Les gens ont un regard différent avec le handisport.

 » Chez les jeunes, l’objectif, c’est de progresser. Et chez les anciens, l’objectif, c’est de se maintenir. « 

Rosario Murcia-Gangloff

| À l’issue de votre marathon aux Jeux paralympiques de Paris, vous avez déclaré que vous vous aligneriez probablement à Los Angeles en 2028. Est-ce toujours le cas ? Si oui, comment vont se construire vos trois prochaines années ?

Je repars pour une autre olympiade. J’ai fini (à Paris) un petit peu dans la souffrance. Je suis vivante, je suis en pleine santé, je suis en bonne santé. Après, comme dit mon mari (Gilles Gangloff) : « arrête tes conneries (rires) ». Avec mon entraîneur (Bernard Pelletier), on a levé méchamment le pied dans beaucoup de domaines. On ne sait pas quand est-ce qu’il y a le marathon des championnats du monde. C’est prévu à New Delhi (27 septembre au 5 octobre), mais il n’y est pas. Par précaution, je vais en préparer un pour la fin de la saison (Marathon Vert de Rennes, le week-end du 25 octobre). Il faut en faire pour valider notre statut d’être de haut niveau. La performance sera prise en compte pour le ranking à l’international. J’essaye de me préserver pour ne pas entamer un peu mon petit corps. Je n’ai plus 20 ans. Je me suis amusée sur 5000 m et 3000 m, je n’ai pas fait du très long. Je me prépare un petit peu parce que les années passent. Chez les jeunes, l’objectif, c’est de progresser. Et chez les anciens, l’objectif, c’est de se maintenir. Après les championnats de France de 5000 m à Belfort (5e au scratch en 20’12’’96), j’ai coupé pratiquement une semaine. Je reprends progressivement cette semaine pour recommencer à partir du mois d’août pour l’avant-prépa du marathon.

| Vous avez porté plainte contre le Béziers Cheminots Athlétisme Méditerranée (BCAM) en fin d’année dernière pour harcèlement et discrimination, club dans lequel vous êtes éducatrice sportive depuis 13 ans. Dans ces circonstances, vous avez décidé de créer un nouveau club…

Oui. M. Ménard (maire de Béziers, positionné à droite voire à l’extrême droite de l’échiquier politique) et le service des sports m’ont donné l’autorisation de créer un autre club et c’est ce qui va se passer à la rentrée. Il y a un deuxième club qui va se créer. On sera déjà plus de 55 licenciés. Je continuerai d’être entraîneur. Mon mari sera président. D’autres camarades seront aussi dans le bureau. Et en tant que trésorier, je prendrai un expert-comptable. Ce sera sur le même terrain. Sur les mêmes chronos que d’habitude. Le club est déjà créé. Il va s’appeler le Grand Béziers Athlète Trail. Tout simplement. Parce que le trail, ça fait partie de la course à pied. Ça fractionne sur la piste. Ça fractionne sur le long. C’est de la course à pied.

« Je peux courir avec lui les yeux fermés, il n’y a aucun problème. »

Rosario Murcia-Gangloff, à propos de son guide Mathieu Leroux

| Vous étiez marraine du Marathon Côte Indigo 2025 (Aude), course dans laquelle vous avez participé aux 5 km au profit du Refuge Arpan (refuge animalier). Quel message entendez-vous insuffler ?

J’aime les animaux. J’ai deux mémères de 15 ans et 16 ans qui courraient avec moi pendant des années, mais maintenant qui font la retraite (sourires). Et j’en ai adopté une autre. Je n’ai plus d’enfants à la maison, mais j’ai des chiens et j’ai des chats. J’en ai toujours eu et j’en aurai toujours. J’ai nourri des chats sauvages. Je vais aider à droite et à gauche. Il y a eu énormément de monde (plus de 4000 personnes sur les quatre épreuves : 5 km, 10 km, semi-marathon et marathon). Soyons responsables. Il faut savoir s’occuper des animaux et non les abandonner. On ne peut pas prendre les chiens ou les chats et les placer ou les donner à quelqu’un à garder. Un animal, ce n’est pas un jouet. Un animal, c’est comme un enfant. On l’a et on va jusqu’au bout avec. Personnellement, ça m’apporte plus qu’un être humain. Ça m’apporte plus parce que l’animal, il le ressent, il sent et il est là quand vous avez besoin de quelqu’un. C’est mon ressenti.

| Vous avez remporté les championnats de France du 10 km 2025 en 40’39 (T12) le 16 mars à Saint-Médard-en-Jalles avec votre guide Mathieu Leroux. Que représente-t-il ?

Alors Mathieu, on est toujours par téléphone et par texto. Il est tellement surbooké avec son poste de président de son club, la Meute running. Quand j’ai vraiment besoin de lui pour une compétition très importante, il répond présent. C’est un grand garçon, il est droit dans ses bottes. Il est nickel-chrome, il est extra. Dans la coordination, il n’y a aucun souci. Je peux courir avec lui les yeux fermés, il n’y a aucun problème. Il gère tout, il est exactement comme mon mari. Quand il y a un passage difficile, il ne va pas me dire que l’on a ralenti, il ne le dira jamais. Mais dira plutôt : « c’est bien ce que tu fais. » Quand il vous parle, c’est rassurant. Il n’y a même pas besoin qu’on s’entraîne régulièrement entre nous. Après les Jeux, on s’est retrouvés pour les championnats de France des 10 kilomètres du côté de Bordeaux (Saint-Médard-en-Jalles). Il n’y a eu aucun problème. Si on en est là, ce n’est pas par hasard. Mathieu, c’est quelqu’un d’incroyable et très sérieux. Il est très sérieux et en même temps, quand on ne le connaît pas, on dit qu’il est pince-sans-rire. Il faut le connaître parce que c’est quelqu’un qui est très joyeux.

| Avez-vous d’autres défis en perspective ?

Oui, je vais préparer le semi-marathon de… (elle appelle son mari). C’est le Semi-Marathon des Oussaillès à Saint-Girons. C’est dans le 09 (Ariège), le 24 août. Ma devise depuis 3-4 ans, je ne fais presque que des courses qui sont pour des bonnes causes. Je paye mon inscription pour les bonnes causes, que ce soit pour les enfants, pour les animaux, pour les handicapés, pour les femmes battues.

À 60 ans, Rosario Murcia-Gangloff prouve que peu importe l’âge, les rêves sont réalisables avec du travail. Malgré le conflit avec son club d’athlétisme de Béziers, cette mère de trois enfants sera sur la ligne de départ du marathon des Jeux paralympiques de Los Angeles. Époustouflant.


Renaud Chevalier
Journaliste

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